
Le public s’étonne souvent de la longueur des procès, s’imaginant qu’au jour où il est convoqué à comparaître devant le Tribunal, son avocat fournira des explications à la suite desquelles le Juge rendra immédiatement son jugement.
La réalité est tout à fait différente.
Des règles de procédure sont prévues, qui tendent à assurer une loyauté et une sécurité minimales dans le déroulement d’un procès, pour éviter les erreurs ou les inéquités.
La première règle qui s’impose aussi bien aux parties au procès qu’au Juge, c’est ce que l’on appelle le principe contradictoire.
Ce principe veut dire que tout ce qui est discuté devant le Juge doit être connu par tous ceux qui interviennent à la discussion.
Il s’ensuit :
- que lorsque vous souhaitez montrer des documents au Juge, il faut aussi les montrer à toutes les autres parties au procès ;
- que si une partie dit quelque chose, une autre partie a le droit de répondre aux arguments avancés ;
- que si le Juge lui-même pense appliquer une règle de droit dont les parties n’ont pas parlé, ou faire effectuer des recherches qui n’ont pas été réclamées ou discutées, il doit provoquer les commentaires de chacun des intervenants sur ce qu’il entend appliquer ou faire.
C’est en quelque sorte une obligation de clarté, de transparence qui doit présider à la conduite du procès.
De même manière, lorsque chacun fait valoir un argument, tous les autres intervenants ont le droit de le discuter ou d’y répondre.
Une autre règle qui s’impose aux intervenants à un procès est qu’il leur appartient de prouver les faits qu’ils allèguent.
Cela veut dire que le Juge ne peut se satisfaire de ce que vous lui racontez par l’intermédiaire de votre avocat mais qu’il n’a à prendre en compte d’explications que celles qui lui sont démontrées par des documents, ou des témoignages.
C’est là quelque chose d’important à souligner dans la mesure où vous pouvez parfaitement être de bonne foi, honnête ou sincère et perdre votre procès : le Juge ne peut en effet vous donner raison que si vous lui démontrez, preuves à l’appui, que ce que vous dites est vrai.
Si tel n’est pas le cas, il devra vous donner tort.
Ce Juge précisément a deux obligations essentielles :
- Il doit trancher le procès conformément aux règles de droits.
S’il lui appartient à cet égard de rechercher la règle de droit applicable, il est d’évidence que les avocats sont là, en tant que professionnels, pour lui proposer les règles de droit qui leur paraissent applicables et qui vont dans le sens de la satisfaction des intérêts de leur client.
C’est cependant, en définitive, le Juge qui choisit.
- Le Juge ne peut se prononcer que sur ce qui lui est demandé et doit statuer sur tout ce qui lui est demandé.
De ces quelques grandes règles découle la façon dont se déroule un procès :
Celui qui demande quelque chose doit établir un document écrit, que l’on appelle assignation ou citation, dans lequel il explique pourquoi il demande quelque chose et indique exactement ce qu’il demande.
Ce document est adressé officiellement, c’est-à-dire par huissier ou par le Greffe du Tribunal, à la personne contre laquelle la demande est faite pour que celle-ci soit au courant de ce qui est demandé contre elle et des motifs pour lesquels cela est demandé.
La personne contre laquelle quelque chose est demandé n’a bien évidemment pas pu s’expliquer avant qu’elle ne soit convoquée devant le Juge.
C’est pour cela qu’elle est convoquée devant le Juge (réellement, ou fictivement par le biais d’un avocat) pour pouvoir s’expliquer.
Pour lui permettre de s’expliquer, elle a le droit de connaître les documents que celui qui lui fait un procès veut montrer au Juge.
Elle a le droit ensuite de s’expliquer sur ces documents, et sur les motifs que son contradicteur avance.
Elle a le droit aussi de son côté de demander quelque chose au Juge.
Toute ces explications et toutes ces demandes sont généralement formées par écrit, pour qu’il en soit laissé trace et que le Juge sache exactement ce qui lui est demandé, et pourquoi cela lui est demandé.
Les explications écrites ainsi fournies le sont par le biais de documents qu’on appelle généralement conclusions ou, dans certaines procédures, mémoires.
Un procès, c’est donc tout d’abord un échange de documents qui définissent l’objet du débat et ce que le Juge doit trancher.
Cela vous fera comprendre deux choses :
- d’une part, que la plaidoirie n’est plus aujourd’hui le moment essentiel d’un dossier où ce qui est dit à l’audience fera qu’il sera gagné ou perdu ;
- bien au contraire, tout travail de préparation, de recherches des règles de droit applicables, de collectes des documents propres à persuader le Juge est aujourd’hui la tache primordiale d’un dossier.
Lorsque enfin, chacun a écrit tout ce qu’il avait à dire et à fait connaître à tout le monde les documents qu’il entend démontrer, le dossier est considéré comme prêt.
C’est alors qu’une date d’audience est déterminée pour que les avocats puissent fournir leurs explications orales, leur plaidoirie.
Le Juge entend celles-ci et, généralement, ne rend pas alors son jugement.
Vous comprendrez en effet qu’il lui faut la plupart du temps consulter tous les documents qui font partie des dossiers des avocats, vérifier les règles de droit qui sont ou ne sont pas applicables, voir si ce que lui ont dit les uns et les autres est bien démontré par les documents qu’ils détiennent.
L’affaire est donc généralement « placée en délibéré », c’est-à-dire que le prononcé du jugement est reporté à une date ultérieure, laissant ainsi qu Juge le temps d’étudier le dossier.
Enfin, quand cette étude a pu être faite, le Juge rend son jugement qui doit normalement trancher tout ce qui est demandé, conformément à la règle de droit.
Le jugement ainsi rendu décharge définitivement le Juge, s’il a jugé ce qui lui était demandé.
Tout cela prend donc du temps et voilà pourquoi un procès n’est pas instantané mais peut quelques fois durer longtemps.
Cela tient généralement à sa complexité, à l’importance des arguments avancés, à la difficulté de rassembler les documents qui permettront de prouver ce que l’on dit.
Voilà pourquoi aussi, les meilleur moyen de gagner un dossier est de justifier par les documents que l’on produit, les témoignages que l’on apporte et les propositions d’application de règle de droit que l’on formule, son bon droit.
Si le rôle de votre avocat est de trouver et proposer les règles de droit les plus propres à soutenir vos intérêts, s’il lui appartient aussi de vous dire ce dont il a besoin, il est certain qu’il vous appartient de lui fournir tous les documents dont vous pouvez disposer que démontreront que vous avez raison.
C’est pourquoi il faut d’une part, satisfaire autant que vous le pourrez aux demandes de votre avocat et d’autre part, comprendre qu’il lui faille, tout comme au Juge, un certain temps pour bien préparer votre procès.
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